Et les droits des femmes ?

Et les droits des femmes ?

Par Kenza Sammoud

Il y a trois semaines que Fatima est rentrée du douar, qui a laissé une profonde empreinte dans sa mémoire. Ce n’était qu’un verger sauvage, mais c’est là que se trouvaient ses peines. L’hegra ne touche pas que Fatima. C’est la vie de milliers de femmes du douar, à commencer par sa mère, dont le cas est loin d’être unique.

Fatima se souvient que sa mère a commencé à travailler aux champs à l’âge de 6 ans. Elle y était harcelée quotidiennement. Elle n’avait pas la possibilité de s’y opposer car c’était sa seule source de revenus. Sa mère n’a pas fait d’études. Elle s’est mariée à l’âge de 12 ans avec un homme qui en avait 30. Un mariage coutumier. Au douar une femme qui ne donne naissance qu’à des filles est être punie. Au bout d’un an, elle a été expulsée de la maison. Fatima non plus n’a pas pu faire d’études car elle n’a pas d’acte de naissance. Elle n’a pas eu d’autre choix que de se marier. Elle avait 14 ans. Elle a vécu 5 ans de violences et de maltraitance. Elle a quitté la maison qu’elle a construite à la sueur de son front. Aujourd’hui, elle est dans un centre d’écoute et a entrepris les démarches pour établir sa filiation et sauver ses deux filles. La Moudawana lui rendra-t-elle justice ? Où sera-t-elle de nouveau victime de la société patriarcale ?

Fatima n’est qu’une des nombreuses femmes dont la voix n’est pas entendue dans la société. Des femmes qui ont été violées, privées de leurs droits et leurs rêves, qui ont vécu comme si elles n’avaient été créées que pour la tâche sexuelle. L’histoire de Fatima est emblématique de l’ensemble des discriminations contre les femmes qui vivent dans différentes régions du Maroc. Depuis l’indépendance, le Maroc a connu les luttes du mouvement des femmes, a intensifiées lors du Printemps arabe. La Constitution de 2011 a marqué une étape dans l’histoire des droits au Maroc, avec une série de transformations au niveau de l’équité, de l’égalité et de l’accès aux ressources de manière égale pour les deux sexes.

Femmes et pauvreté

En ce qui concerne la pauvreté en lien avec les femmes, le Maroc a fait des efforts pour lutter contre la pauvreté et la vulnérabilité des femmes, dont l’Initiative nationale pour le développement humain (INDH). Mais ces efforts restent limités. L’autonomisation économique des femmes reste en effet une nécessité urgente car elle est la condition essentielle d’une avancée sur le plan juridique.

Le législateur marocain doit garantir un plus grand accès des femmes à la formation professionnelle, et leur assurer un accès aux moyens de production, même au niveau de la distribution financière. Il doit respecter le genre et aussi intégrer l’approche genre dans les plans de développement nationaux.

Femmes et accès à l’éducation

La fragilité économique des femmes ne se tient pas qu’à la pauvreté mais aussi à l’éducation, surtout en milieu rural. C’est ce qui a contraint le Maroc à soutenir la scolarisation des filles rurales, en assurant le transport scolaire et en encourageant les familles à permettre à leurs enfants de terminer leurs études. Mais cela n’a pas suffi à éliminer la déperdition scolaire qui plane encore sur les montagnes des villages du Maroc profond. D’autre part, la culture du sexisme et les stéréotypes qui perpétuent la domination masculine dans la société sont aussi un point à discuter dans la lutte pour l’égalité.

Il est essentiel de redoubler d’efforts pour lutter contre l’analphabétisme, en activant le rôle des collectivités territoriales, pour élever le niveau d’éducation des femmes.

Femmes et violence

Depuis des années, les femmes au Maroc luttent pour leurs droits. Cela a abouti à la loi 103.13, relative à la lutte contre la violence à l’égard des femmes. Mais cette loi n’a pas joué son rôle de dissuasion. Le législateur doit la rendre plus globale et en parallèle reformuler le code pénal.

L’histoire de Fatima, mariée mineure, est une réalité qui nous oblige à modifier l’article concernant le mariage des mineurs dans la Moudawana.

La violence à l’égard des femmes demeure la pire forme d’atteinte à leur dignité d’être humain et de membre de la société qui doit jouir de tous ses droits, sans subir aucune forme de discrimination.

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